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lundi 12 mai 2014

Situation épidémiologique de la tuberculose au Cameroun

Dépistage de la tuberculose
Le fardeau de la tuberculose peut être mesuré en termes d’incidence (nombrede nouveaux cas de TB et de rechutes pendant une période déterminée), de prévalence (nombre de cas de TB à un moment déterminé) et de mortalité (nombre de décès par TB pendant une période déterminée). Ces indicateurs sont difficilement mesurables et leursestimations sont fort incertaines. Le Cameroun n’a pas effectué d’enquête nationale de prévalence de la TB et ne dispose pas de données de mortalité issuesd’un système de collecte des données d’état civil. Il n’appartient pas non plus aux 96 pays pour lesquels les estimations de l’incidence ont été revues sur base de l’analyse des données disponibles de notification, d’enquête ou de surveillance,enconsultation avec les pays, et en tenant compte de l’opinion d’experts concernant la proportion des cas diagnostiqués non rapportés ou non diagnostiqués.
L’OMS estime qu’en 2012 le taux de mortalité par TB au Cameroun, en excluant le VIH, était de 29 (12-54)/100.000, le taux de prévalence toutes formes y compris VIH positives, était de 319 (153-344)/100.000 et le taux d’incidence, incluant aussi les cas VIH positifsétait de 238 (117-283)/100.000 habitants[1] . Ces estimations placent le Cameroun dans le même groupe de pays que le Tchad, la Guinée Equatoriale etla Côte d’Ivoire. Toutefois, vu la grande incertitude de ces estimations, le PNLT utilise les chiffres de notification et leurs tendances pour estimer le fardeau de la TB au Cameroun et pour la planification.
Le nombre total de cas de tuberculose détectés en 2013 était de 26.110 (tableau 2)[2] . Il a doublé entre 2002, année où le programme a atteint une couverture nationale,et 2006, pour se stabiliser ensuite autour de 25.000 cas par an.                                
                Tableau 2. Notification des cas de tuberculose au Cameroun. 2004-2013
 
Nouveaux cas TPM+
Rechutes
Echecs
Reprises
TPM-
Extra-pulmonaires
Total
Variation
2004
11 656
767
103
470
3 690
2 104
18 790
 
2005
13 006
1 016
93
481
5 021
2 461
22 078
17%
2006
13 811
901
88
475
6 569
3 035
24 879
13%
2007
12 217
928
543
494
7 588
3 033
24 803
0%
2008
14 233
917
91
412
6 282
3 191
25 126
1%
2009
14 308
1 035
128
373
5 672
3 165
24 681
-2%
2010
14 464
1 015
167
312
5 437
3 157
24 552
-1%
2011
14 927
1 068
163
430
4 941
3 597
25 126
2%
2012
15 016
1 058
158
400
5 204
3 524
25 360
1%
2013
15 080
1 140
126
387
5 501
3 877
26 110
3%
On relève néanmoins une augmentation de 3% du total de cas en 2013 par rapport à 2012, portant essentiellement sur les formes non confirmées. En tenant compte de la croissance de population estimée à 2,5%[3] , le taux de notification est plutôt en décroissance. En général, environ 60% des nouveaux cas sont atteints de tuberculose pulmonaire à microscopie positive (TPM+).
Figure 2. Evolution de la notification de la TB au Cameroun. 2002 à 2013
En 2013, le taux de notification de la TB toutes formes confondues était de 125/100.000 et celui de la tuberculose à microscopie positive était de 72/100.000. De fortes variations sont observées selon les régions (voir tableau 3 et figure 3).
Tableau3. Détection de la TB par région. 2013
NB : Les villes de Douala et Yaoundé sont comptées comme régions épidémiologiques séparées afin de mettre en évidence l’importance du problème de la tuberculose urbaine.
En 2013, 34% du total de cas étaient détectés à Yaoundé et Douala, proportion semblable à celles des années antérieures. Les taux de notification les plus élevés sont habituellement trouvés dans les grandes villes, ce qui se vérifie pour Douala mais moins pourYaoundé. Concernant les taux de notification particulièrement élevés constamment rapportés par la région de l’Est, plusieurs explications sont possibles. La première serait une sous-estimation de la population totale, due entre autres au flux régulier de réfugiés de CAR, en hausse depuis la fin 2013 (voir ci-dessus section 2.4). Deuxièmement, la région de l’Est, comme celles du NO et du SO, ont des prévalences élevées de VIH parmi la population. Par ailleursle taux de notification varie de façon significative entre les régions, avec l’existence de zones à forte transmission de TB, ce qui a été mis en évidence par une étude récente sur la notification de la TB à Douala.[4] Enfin il pourrait y avoir des problèmes de qualité des données.



Figure 3. Taux de notification de la TB par région. 2013
1.2.       La co-infection TB/VIH
            Le dépistage du VIH chez les malades tuberculeux est devenu presque la routine. En 2013, 82% des tuberculeux ont été testés pour le VIH, 38% du total des cas et 32% des nouveaux TPM+ étaient VIH+, ce qui place le Cameroun parmi les pays à forte prévalence de coinfection TB-VIH. Celle-ci est restée stable au cours des dernières années, ce qui peut être associé à la persistance de l’épidémie du VIH dans le pays et au fait que la couverture de la thérapie antirétrovirale est encore faible par rapport aux besoins (environ 50% des cas éligiblesétaient sous ARV à la fin 2011 selon les estimationsdu CNLS)[5] .
On observe des variations significatives entre les régions, ce qui reflète la distribution inégale de l’infection par le VIH dans la population. Les régions du NO, SO et Est rapportent les taux les plus élevés de coinfection parmi les nouveaux cas TPM+ tandis que l’EN relève le taux le plus faible. Les taux de coinfection parmi les autres formes de tuberculose peuvent être faussés par un diagnostic incertain de tuberculose. En termes de nombre de cas, les villes de Yaoundé et Douala fournissent environ le tiers des patients coinfectés (35% en 2013).
Tableau 4. Coinfection TB-VIH chez les patients tuberculeux notifiés au Cameroun en 2013
 
Nouveaux cas TPM+
Tous les cas de TB
Regions
Testés
VIH+
Testés
VIH+
Adamaoua
83%
33%
80%
37%
Centre
82%
31%
80%
37%
Yaoundé
79%
33%
77%
46%
Est
76%
40%
75%
48%
Extreme-Nord
83%
15%
75%
18%
Littoral
97%
30%
98%
36%
Douala
89%
25%
85%
36%
Nord
66%
23%
64%
27%
Nord-Ouest
98%
60%
98%
60%
Ouest
94%
32%
94%
40%
Sud
91%
35%
90%
38%
Sud-Ouest
89%
39%
88%
44%
Cameroun
12.729 (84%)
4.037 (32%)
21.329 (82%)
8.147 (38%)
1.3.       La tuberculose multirésistante
            Le WHO Global Tuberculosis Report 2013 estime à 670 (140-1200) le nombre total des cas de TBMR pour le Cameroun pour l’année 2012, dont 510 (2-1000) parmi les cas jamais traités auparavant et 160 (57-270) parmi les cas de la tuberculose déjà traités pour la TB. Les intervalles larges de confiance donnés par l’OMS indiquent le niveau d’incertitude concernant le problème de la TBMR au pays. Même si aucune enquête nationale sur la résistance aux antituberculeuxn’a été menée, on dispose des résultats d’une série d’enquêtes régionales(tableau 5) et de la surveillance systématique de la résistance parmi les cas de retraitement réalisée dans plusieurs régions au cours des dernières années. En 2013, cette surveillancea été faite en routine dans les régions de Douala, Littoral, NO, Ouest, SO et Yaoundé. Les autres régions n’ont pas résolu le problème d’envoi des échantillons au laboratoire de référence.
Tableau 5. Données disponibles sur la TBMR au Cameroun suite aux études prospectives de prévalence et à la surveillance systématique continue parmi les retraitements.
Année
Région
Source données
TBMR parmi les cas jamais traités (%)
TBMR parmi les cas déjà traités (%)
1997/98
Ouest[6]
Etude prospective, 1 année, incluant tous les cas TPM+, (>85% testés)
1,4
13,2
2004/05
Ouest[7]
Etude prospective, 1 année, incluant tous les TPM+, 616 (>85% testés)
3,3
17,2
2009/10
Adamaoua[8]
Etude prospective, 1 année, incluant tous les TPM+, 509 (>85% testés)
1,4
10,5
       
Echec
Rech.
Reprise
TOT
2009
Littoral[9]
Surveillance systématique des cas de RT (49% avec résultat ATB*)
-
70,0
12,1
3,0
12,0
2011
Littoral[10]
Surveillance systématique des cas de RT (63% avec résultat ATB)
-
76,5
13,6
7,9
16,8
*RT = retraitement, ATB = antibiogramme
La prise en charge de la TBMR se fait au moyen d’un schéma court de 9 mois[11] et le Cameroun participe à l’étude multicentrique qui est conduite par L’Uniondans neuf pays d’Afrique. Le traitement est initié en hospitalisation à l’Hôpital Jamot, au CS Dibamba (Douala) ou à l’HR Bamenda. Après la phase injectable, le traitement est administré en ambulatoire à Douala et à Bamenda. Ce programme a été lancé en 2007 avec un support technique et financier important de la GIZ. La continuité du financement est prévue dans le projet R9 du FM. Dans la pratique, le programme n’a pas encore bien intégré cette composante et tous les mécanismes ne sont pas encore en place pour assurer son bon fonctionnement. De plus, l’approvisionnement en certains médicaments de deuxième ligne pose problème au cours des derniers mois, ce qui a entrainéun faible taux d’enrôlement au traitement des malades diagnostiqués.
Le Tableau 6 montre les cas TBMR diagnostiqués et mis sous traitement au cours des dernières années. Parmi les cas identifiés et mis sous traitement se trouve également une fraction de cas-contact de malades TBMR déjà connus.
Tableau 6. Dépistage et prise en charge des cas TB MR au Cameroun en 2013
Année
Nombre de retraitement (RT) notifiés (pays)
Nombre (%) de RT avec ATB
Nombre (%) de cas TBMR identifiés
Nombre (%) de cas TBMR mis sous traitement
2009
1,536
241 (16)
46 (19)
33 (72)
2010
1,492
228 (15)
51 (22)
35 (69)
2011
1,661
352 (21)
86 (24)
69 (80)
2012
1,616
545 (34)
101 (19)
53 (52)
2013
1,652
721 (44)
123 (17)
75 (61)
1.4.       La TB dans les prisons et autres lieux de détentions
            Dans des pays comme le Cameroun à forte prévalence de TB et VIH, ces deux maladies constituent des risques majeurs pour la santé des prisonniers. Une étude récente sur l’incidence de la tuberculose (2011/12) montre que malgrél’existence d’un programmede contrôle de la TB et le VIHdepuis 2007 dans dix prisons,conçu et réalisé selon les recommandations internationales, le taux de notification de la TB pulmonaire parmi les détenus est resté en moyenne près de 10 fois plus élevé que celui observé dans la population générale comparable ajustée pour l’âge et sexe.[12] Aucune donnée sanitaire n’est disponible pour les autres lieux de détention.


World Health Organization (2013). Global tuberculosis report 2013.Geneva (Switzerland).
Données rapportées au 10 février 2014 à la réunion d’évaluation nationale annuelle.
Projections des populations selon UN
Nana A, Noeske J, Dambach P et al.Spatial analysis of tuberculosis in Douala, Cameroon: Clustering and links with socio-economic status. IJTLD 2014, in press.
Comité National de Lutte contre le SIDA. Groupe Technique Central. Rapport national de suivi de la Déclaration Politique sur le VIH/SIDA Cameroun. 30 mars 2012
Kuaban C, Bercion R, Noeske J. et al. Anti-tuberculosis resistance in the West Province of Cameroon. Int J Tuberc Lung Dis 2000; 4(4): 356-360.
Noeske J, Kuaban C. Impact of Tuberculosis Control on Resistance to Anti-Tuberculosis Drugs in the West Province of Cameroon. Int J Tuberc Lung Dis 2007, 11 (11), Suppl. 1 (PS-71525-10).
Kuaban C, Um Boock A,Noeske J et al.Mycobacterium tuberculosis complex strains and drug susceptibility in a cattle-rearing region of Cameroon.Int J Tuberc Lung Dis. 2014 Jan; 18(1):34-8. doi: 10.5588/ijtld.13.0333
Noeske J, Voelz N, Fon Eet al. Early results of systematic drug susceptibility testing in pulmonary tuberculosis retreatment cases in Cameroon. BMC Res Notes. 2012 Mar 21;5(1):160
Noeske J, Sander M, Kuaban C.MDR-TB surveillance among retreatment cases under program conditions in Littoral Region, Cameroon, 2009-2011.Int J Tuberc Lung Dis 2013 12 (16), Suppl. 3 (PC-899-03).
Ce régime de traitement comprend une phase intensive de 4 mois avec 7 antituberculeux suivie d’une phase de continuation de 5 mois avec 4 antituberculeux (4KmMfxPtoHCfzEZ/5MfxCfzEZ).
Noeske J, Ndi N, Amougou Elo G, Mbondi Mfondih S.Tuberculosis incidence in Cameroonian prisons: A 1-year prospective study. SAMJ 2014 (in press).

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