Yaoundé, dans un Café de la ville le 24 décembre 2013.
Les disciples de Bacchus entre deux gorgées d’hydromel célèbrent la naissance
de Jésus Christ. Ici les voutes de fumées de leur cigarettes aux odeurs peu
délicates enfument le bistrot en
s’élevant allègrement vers une affiche « interdit
de fumer ». Ceci, dans l’indifférence des clients du bar. Seul le
gérant de l’institution et quelques de ses serveuses demandent aux fumeurs de
sortir de salle du Bistrot pour la terrasse. Là-bas, ils peuvent griller une
cigarette sans problème.
Au Cameroun, elles ne sont pas nombreuses les
institutions et personnes qui portent des actions aussi louables en matière de
lutte contre le tabagisme. La plupart des bons élèves se recrutent au sein des
formations sanitaires et des institutions dont les patrons souffrent de problèmes respiratoires.
Une législation
faible
Pour lutter contre le tabac et ses méfaits, le
Cameroun a pris nombre de mesure dont les plus importantes sont sans doute : la ratification de la
Convention Cadre de l’OMS pour la lutte anti Tabac ; la loi N°2006/018 du 29 décembre 2006
régissant la publicité au Cameroun, l’arrêté N°967 MINSANTE/MINCOMMERCE du 25
Juin 2007 portant marquage sanitaire des emballages des produits à base de
tabac. Aujourd’hui, force est de
constater que malgré l’application de ces mesures juridiques, les risques liés
au tabagisme dans notre pays sont de plus en plus grand. Résultat, 17,5 % de la population est fumeur.
37% de la population camerounaise est exposé à la fumée dans les lieux publics
et par conséquent aux même risques
sanitaires que les fumeurs.
Plus de 15, 5%
des jeunes consomme du tabac, sous diverses formes, notamment la chicha et les joints de cannabis. Le
narguilé, depuis longtemps populaire en en Afrique subsaharienne est de plus en plus prisé dans les métropoles
Camerounaise, où ce mode de consommation séduit les jeunes et en particulier
les filles. « C’est un produit associé à la convivialité. Or une chicha,
c’est l’équivalent de 40 cigarettes », explique le professeur Hichem
Aouina, pneumologue, membre de la Commission nationale tunisienne de la lutte
contre le tabagisme.
Autre signe inquiétant l’âge de la première cigarette.
« Avant 7 ans, la prévalence tourne
autour de 5 % »
Publicité
sournoise
Au Cameroun la publicité en faveur du tabac est
interdite. Mais au quotidien, l’on
remarque que cette loi reste l’apanage des médias. Les cigarettiers qui font des efforts dans les
grandes villes profitent de la faiblesse de cette loi et de celle du système pour améliorer leur
stratégie marqueting. En effet Ils
continuent à faire de la publicité mais de façon sournoise. Et s’ils font
quelques efforts dans les villes, rien n’a changé dans les zones rurales.
Si l’OMS et la Coalition Camerounaise contre le Tabac
ont récolté le plus de données possible, il est encore difficile d’évaluer
l’impact des politiques de sensibilisation. « Les choses changent malgré tout
», estime le docteur Flore Ndembiyembé, Présidente du conseil d’administration de l’Alliance pour
le Contrôle du Tabac en Afrique et présidente de la Coalition Camerounaise
Contre le Tabac.
« Les
populations sont de plus en plus informés des dangers liés à cette addiction.
Il faut cependant regretter qu’aucun accompagnement au sevrage ne soit soutenu
par les pouvoirs publics. »
Au Cameroun Comme dans la plupart des pays africains,
les patchs et autres formes de substituts nicotiniques ne sont disponibles que
dans quelques points de vente et, de toute façon, hors de portée de la plupart
des porte-monnaie. Pas étonnant
dans ces conditions que les fumeurs les plus réguliers se trouvent parmi les
populations les plus pauvres.
Au Cameroun, La consommation, sous toutes ses formes,
est aisée même les mineurs s’y lancent sans problème. Ici, À toute heure, dans quasiment tous les
quartiers des grandes villes, mais aussi dans les villages les plus reculés,
on trouve toujours un vendeur de rue ou
une boutique est ouverte. Le paquet de
cigarette le plus couteux est de 1500 et le moins couteux 300 Fcfa, alors que
la boîte de 36 gommes à mâcher à la nicotine coûte 4 000 F CFA. Aucune compagnie d’assurance-maladie ne prend en
charge les frais de sevrage. Une situation qui fait en sorte que le tabac soit
le produit le plus vulgaire du pays.
Plus facile à trouver qu’un comprimé de Nivaquine.
Lueur d’espoir
Le problème est un peu le même partout. Le Cameroun
comme d’autres États africains a adhéré
à la Convention Cadre de l’OMS pour la Lutte Anti Tabac, mais sa mise en œuvre
et son application traînent. En effet,
il n’existe pas de véritable politique nationale anti tabac, les efforts de
lutte conduite par la Société civile sont financés par des bailleurs de fonds.
Toutes fois il convient de dire que de gestes quotidiens
posés par les populations camerounaises montrent que le message de lutte anti tabac passe. Dans
les écoles les enfants reçoivent des enseignements sur les méfaits du Tabac.
Dans les rues et les associations de plus de conversation sont alimentés par le
tabac et ses effets néfastes. Dans certaines résidences, il est interdit de
fumer. Les médias quant à eux, en ont fait un sujet phare.
Au regard de l’état actuel de l »épidémie de
tabagisme au Cameroun, l’adoption d’une loi anti tabac conforme aux
dispositions de la Convention Cadre de l’OMS pour la lutte anti tabac est la
solution idoine pour le lutter contre se mal dans notre pays et protéger la
santé de nos populations et notre environnement des effets dévastateurs du
tabac.
Afrique : Cancers en hausse
« Lorsque j’étais pneumologue à N’Djamena,
j’avais, en 1989, un cas de cancer du poumon tous les deux mois ; en 1999, nous
en étions déjà à quatre à cinq cas par mois », se souvient le docteur
Jean-Pierre Baptiste, aujourd’hui en charge du programme régional de lutte
contre le tabagisme à l’OMS. Même tendance en Tunisie, où, selon Wilded Ben
Ayoub, le cancer du poumon arrive en tête des cancers chez les hommes.
« Et d’ici à 2024, il y en aura quasiment quatre fois plus
qu’aujourd’hui », prévoit cette tabacologue qui tient une consultation
gratuite à l’institut Salah Azaïz de Tunis. De moins bonne qualité, les cigarettes
vendues en Afrique ont souvent une plus forte teneur en nicotine et en goudron.
Elles sont donc plus additives et plus dangereuses, selon l’OMS. Pas de quoi
être optimiste. « Il faut agir maintenant pour ne pas atteindre les
niveaux de consommation des pays du Nord, avertit Jean-Pierre Baptiste.
L’Afrique n’est qu’au début de l’épidémie. »
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